«Shuggie Bain», Douglas Stuart, 2021, Globe

Agnes s’est amouraché de Big Hugh pour qui elle a quitté son mari avec ses trois enfants. Il est d’ailleurs le père du 3e, Shuggie.
La nuit où elle plaque tout, Big Hugh n’a nulle part où l’emmener et il la largue chez ses parents.

Agnes ne travaille pas, s’ennuie. Sa meilleure amie est la boisson. Bière. Vodka.
Big Hugh la bat avec une violence inouïe, mais elle l’a dans la peau, comme elle a la boisson dans le sang.

Ses trois enfants et ses parents n’ont plus qu’à la regarder se suicider à petit feu.

Quand Big Hugh finit par lui trouver une maisonnette dans la campagne de Glasgow, Agnes croit à une nouvelle vie, plus verte, plus famille.
Mais non. La maison n’est que moisissure au pied des mines qui ont toutes fermées. Le quartier n’est que misère. Les voisins ne sont que violence, alcool et décrépitude.
Et Big Hugh les plante là!

Shuggie va prendre le relais, s’occuper de sa mère du haut de ses sept ans, lui cacher les violences qu’il subit, lui, le petit garçon pas comme les autres et jouer à la démerde.

Cette histoire est une déchirure. Elle tient sa force dans son authenticité mais aussi dans son universalité. Combien d’Agnes sur cette terre? Combien de Shuggie? Combien de gouvernements laissent leurs miséreux crever sans politique d’emploi, familiale ou éducative? Combien de gouvernements laissent leur plèbe crever d’alcoolisme et de faim?

Shuggie est un survivant, il sera porté en exemple pour sa force. Mais combien d’autres restent sur le trottoir la gueule ouverte?

C’est une plume puissante qui se lit toute seule, mais un roman qui heurte en profondeur.
C’est le réalisme de la misère dans toute sa force racontée avec pudeur, à hauteur d’enfant avec la tendresse de l’adulte qu’il est devenu. Car Shuggie n’est qu’amour et Douglas Stuart en a tant pour cet enfant, pour cette mère, pour son grand frère et sa grande sœur qui l’ont abandonné pour sauver leur peau.
C’est pour l’amour qu’il faut lire ce roman, car il est la preuve qu’il peut encore émerger de tout cloaque.

Lu dans le cadre du Prix Bookstagram.
Excellente traduction de Charles Bonnot.

3 comments On «Shuggie Bain», Douglas Stuart, 2021, Globe

  • Je viens de vérifier, ce roman est disponible dans les rayonnages de ma médiathèque !
    Je suis conteuse et j’interviens trois après-midi par semaine dans un lieu d’accueil parents-enfants de la PMI depuis 8 ans. Je n’aurais jamais soupçonné toutes les misères familiales, sociales auxquelles certains enfants sont confrontés dès leur plus jeune âge. Je l’avoue, il m’arrive parfois de rentrer chez moi complètement bouleversée.

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