
Désiré grandit au « village », la cambrousse, le petit bourg aux quelques commerces et à l’avenir limité.
Il est le fils préféré et choyé d’une famille de commerçants qui se tuent à la tâche.
Après avoir décroché son bac, après avoir goûté la grande ville, après avoir tâté l’aventure, Désiré en veut plus. Alors c’est la grande expérience, la blanche, la pure, l’héroïne.
Dans les années 80, quand les junkies se passaient les seringues, ils se passaient aussi le SIDA, cette maladie qui fait honte, qui touchent les groupes stigmatisés, les tue dans les pires souffrances. Les malades l’ont bien cherché n’est-ce pas?
Heureusement, quelques médecins vont s’atteler à la tâche et tenter de devancer les ravages de ce virus que personne ne connaît.
Ce sont ces deux histoires qu‘Anthony Passeron nous raconte. Celle de son oncle Désiré et de sa famille écrasés par la souffrance et la honte, et celle de ces médecins opiniâtres qui ne lâcheront pas leurs recherches malgré le rejet du reste de la communauté scientifique et de la société.
L’auteur raconte de manière efficace, chronologique, sans en faire trop, dans un style fluide et sobre. Les faits se suffisent à eux-mêmes. Le ton est humain alors qu’il aurait pu être revanchard, apaisé alors qu’il aurait pu être haineux.
Il a enfin mis des mots sur ce que chez lui on s’acharne à taire.
C’est une lecture éprouvante. Les drogues, le SIDA, le rejet, c’est bien sûr toute ma jeunesse, mes peurs d’adolescente, notre famille touchée de plein fouet, des stigmates à vie. Je n’ai pas pu le lâcher et j’en suis ressortie bien mal pendant des heures. Pourtant, une fois la plaie réouverte puis refermée je suis apaisée, moins seule.
Quelle belle lecture! Quel beau roman! Quel sujet terrible!
2 comments On «Les enfants endormis», Anthony Passeron, RL2022, Éditions Globe
J’ai lu avec grand intérêt ce roman qui m’a, d’une part, renvoyé à mes vingt ans dans les années 80 et d’autre part, profondément émue avec le parcours de cette famille meurtrie. J’ai également apprécié les chapitres consacrés à la recherche médicale que j’ai trouvé passionnant. Ce roman est un grand roman.
J’ai vécu ce roman comme toi. Je l’achèterai en poche et le relirai.